L’ASIC s’inquiète des modalités, proposées par la CNIL, de mise en oeuvre du droit à l’oubli et de leur impact sur la liberté d’expression
Paris, le 30 septembre 2013 – L’Association des Services Internet Communautaires (ASIC), fondée en 2007 et qui regroupe les acteurs de l’internet communautaire, publie aujourd’hui sa réponse à la consultation publique de la CNIL sur le droit à l’oubli (texte de la consultation accessible en annexe à notre réponse).
Le 25 janvier 2012, la Commissaire européenne Viviane Reding a rendu publique sa proposition de règlement européen relatif à la protection des données personnelles. Ce texte est destiné à remplacer la directive de 1995 et surtout à permettre l’édification d’un cadre commun à l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne. Dans ce texte sont contenues plusieurs propositions et notamment, celle relative à la création d’un droit à l’oubli.
Le 10 octobre 2012, l’ASIC en lien avec d’autres associations (ACSEL, IAB France) avait organisé, sous le patronage de la Commission européenne, une conférence avec plus de 50 représentants d’acteurs économiques et un représentant de la CNIL. L’ensemble des acteurs avait fait part de réelles difficultés avec le projet de règlement et demandait une consultation plus large des petites, moyennes et grandes entreprises.
Alors que les Ministres de la justice des pays européens doivent se rencontrer le 7 octobre pour avoir une nouvelle discussion et rechercher un accord, la CNIL a lancé le 1er août 2013 une consultation “publique” auprès d’acteurs économiques pour les interroger sur les pistes que celle-ci promeut auprès des autorités françaises et communautaires.
Sur la méthode suivie par la CNIL, l’ASIC relève que :
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l’absence de publicité et de communication large de la consultation mise en oeuvre par la CNIL semble n’avoir pas permis à l’ensemble des acteurs économiques concernés de pouvoir lui faire part de leurs remarques ;
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l’intervention tardive de cette consultation publique alors que la CNIL a formulé à plusieurs reprises, publiquement et auprès des diverses instances, ses propres recommandations ne nous semble pas avoir pour objet ou pour effet de recueillir et de tenir compte de l’avis des professionnels concernés ;
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l’absence de données précises de la part de la CNIL – hormis le chiffre du millier de demandes – ne permet pas d’appréhender les types de demande dont celle-ci peut être destinataire – d’autant plus que cela diffère notablement du volume de demandes constatées par les membres de l’ASIC.
Sur les propositions formulées par la CNIL, l’ASIC considère que :
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la loi de 1978 permet d’ores et déjà à une personne de s’opposer aux données les concernant s’il détient un motif légitime ;
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le droit à l’oubli doit permettre à chaque utilisateur de pouvoir gérer facilement les données qu’il a décidé de publier sur internet ;
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le droit à l’oubli ne doit pas aboutir à mettre en oeuvre un mécanisme de suppression automatique des contenus publiés par une personne sous peine de créer un phénomène de déresponsabilisation qui serait préjudiciable à tous ;
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le projet de la CNIL d’imposer aux hébergeurs une obligation de suppression de contenus, sans passage préalable par le juge, semble attentatoire à la liberté d’expression ; un hébergeur ne sera pas en mesure d’apprécier si la demande de suppression d’un billet de blog, d’une vidéo ou d’un article de presse sera la conséquence d’un motif légitime exprimé par un particulier. Seul l’auteur du contenu en lien avec le demandeur sont en mesure d’apprécier cela.
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il revient à la CNIL d’engager une concertation avec les acteurs de la presse en ligne afin d’identifier les manières de concilier droit à l’oubli et droit à la liberté d’information ;
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il revient à la CNIL d’engager une concertation avec l’ensemble des acteurs sur la mise en oeuvre et l’impact que pourrait avoir un droit à la portabilité ; cette question devant être traitée séparément de celle du droit à l’oubli.
En outre, l’ASIC invite fortement la CNIL à engager une grande action de sensibilisation des internautes sur la manière dont ces derniers sont en mesure de gérer et de contrôler la diffusion des informations qu’ils décident de publier sur le net.
Pour les membres de l’ASIC, “au regard des propositions formulées par la CNIL, il est urgent que le Ministère de la justice et le Ministère de l’économie lancent dès que possible une information et consultation large de l’ensemble des acteurs économiques sur les mesures proposées par la France dans le cadre du projet de règlement européen sur les données personnelles”.