Fiscalité du numérique : la France aux portes de la récession numérique

Un nouveau rapport propose de taxer le publicité en ligne et plus généralement le numérique. Il oublie, une nouvelle fois, que la transformation numérique de l’économie française est dorénavant en marche.

Paris, le 10 mars 2015. – L’Association des Services Internet Communautaires, (ASIC), fondée en 2007 et qui regroupe l’ensemble des plateformes d’hébergement, s’inquiète du retour, une nouvelle fois, de propositions tendant à mettre en oeuvre une taxation spécifique pour Internet.

A la suite du rapport de Pierre Collin et Nicolas Colin (Janvier 2013), le Gouvernement avait demandé au Conseil national du numérique d’en analyser le contenu et de publier un avis (Septembre 2013). Ce dernier avait alors recommandé de demander à un groupe d’économistes de se pencher sur la question de la fiscalité du numérique. Ce rapport sur le rapport du rapport, commandé par France Stratégie a été publié hier.

Il propose plusieurs idées de taxation des acteurs de l’internet incluant, notamment et non exclusivement, une taxation de la publicité – la même que celle proposée depuis des années par le Sénateur Marini, une taxation du commerce électronique, une taxation en fonction du nombre d’internautes, une taxation en fonction du nombre de données stockées sur le territoire français, une taxation sur la base des données échangées, etc.

Tout d’abord, en matière de fiscalité des multinationales, il est important que les Etats adaptent le cadre juridique qu’ils ont élaboré au cours des quarante dernières années. La France se doit donc de supporter les travaux actuellement en cours au sein de l’OCDE relatifs à l’érosion des bases fiscales (BEPS), quand bien même ceux-ci viseraient l’ensemble des multinationales et non exclusivement celles du numérique.

Ensuite, il est inquiétant de voir que ce rapport a été réalisé sans réelle collaboration et même échanges avec les divers acteurs français de l’économie numérique. En effet, le rapport ne tient pas compte du fait que le numérique n’est plus un secteur à part entière.

L’ensemble des services développés par l’économie numérique se retrouvent aujourd’hui dans tous les secteurs économiques. Les diverses plateformes de vidéos sont aujourd’hui utilisées par les industries culturelles qui y voient un vecteur de promotion, de communication mais aussi de valorisation de leurs oeuvres. Les réseaux sociaux sont présents en entreprises ; les services de stockage deviennent monnaie courante.

Aujourd’hui, la transformation digitale des entreprises, de toutes les entreprises, est en marche. Et toute mesure visant spécifiquement le numérique touchera toutes les entreprises françaises.

Par ailleurs, les diverses mesures proposées peuvent soulever de nombreuses critiques. Sans entrer dans le détail, prenons quelques exemples:

  • Une taxe sur les données échangées ? Il faudra donc installer des sondes pour espionner chaque fait et geste d’un internaute en France

  • Une taxe sur le stockage des données? Celui-ci deviendra donc plus cher sur le territoire français au plus grand bénéfice des concurrents européens

  • Une taxation en fonction du nombre d’utilisateurs français ? Une excellente incitation à lancer sa start-up ou son entreprise, ailleurs qu’en France

  • Une taxation de la publicité ciblée – pour forcer les entreprises françaises à recourir à un modèle économique, celui du modèle payant ? Un avantage sans doute concurrentiel pour toutes les entreprises basées hors de France, non résidentes fiscales et donc, non soumises à cette nouvelle mesure.

  • Une taxation de la publicité ? Proposée initialement en 2007 par le Sénateur Marini, maintes fois rejetées car visant exclusivement les acteurs domiciliés en France.

“Depuis 3 ans, la France a engagé toute une réflexion destinée à créer une réglementation particulière, notamment fiscale, pour les acteurs du numérique. C’est oublier que toutes les entreprises se transforment grâce au numérique. C’est donc ne pas voir que chaque nouvelle mesure touchera toutes les entreprises”, ont précisé les dirigeants de l’ASIC. “La France est sur le chemin de la récession numérique”.

Communiqué