Directive Droits d’auteur : la Commission ouvre une brèche dans le statut de l’hébergeur

Les propositions de la Commission européenne favorisent les acteurs en place, la sur-réglementation et les mécanismes de subvention

Paris, le 19 septembre 2016 – L’Association des Services Internet Communautaires (ASIC) a pris connaissance du projet de Directive sur les Droits d’auteur dans le marché unique numérique publié ce mercredi par la Commission européenne et exprime sa plus vive inquiétude sur les attaques qui sont faites à des principes fondamentaux de l’Internet défendus par l’ASIC depuis son origine.

Le projet de Directive sur les droits d’auteur ébranle deux de ces principes :

  • Les liens hypertextes : la Commission propose d’instaurer un droit voisin pour les contenus presse. Les éditeurs de presse en ligne pourront demander rémunération pour l’utilisation – l’indexation, un court extrait, un partage sur un réseau social, etc. – de leurs contenus.

  • Le statut d’hébergeur : le projet de directive prévoit que les intermédiaires doivent conclure des accords de licence et prendre des mesures de protection des contenus grâce à des technologies de reconnaissance de contenu. Le diable étant dans les détails, le texte ne s’arrête pas à ce qui aujourd’hui a été mis en place volontairement depuis près de dix ans par les hébergeurs membres de l’ASIC comme Dailymotion et YouTube – à travers les contrats conclus en France avec la SACD, la SACEM, la SCAM et l’ADAGP… et l’adoption de systèmes de reconnaissance de contenus type (Audible Magic, Signature ou Content ID…) – mais va plus loin et prévoit une obligation de “prévenir la disponibilité des contenus” sur ces plateformes. L’article 13 veut ainsi instaurer une obligation de monitoring et de filtrage pour ces plateformes en contradiction totale avec les principes de la Directive E-commerce.

Si ce texte approximatif et bancal devait être adopté en l’état, c’est tout le modèle ouvert de l’internet qui serait ainsi remis en question : la faculté pour tout un chacun – sans avoir à maîtriser des capacités de codage pour créer son propre site – de partager des liens sur le web ; la possibilité pour chacun de mettre en ligne des contenus, par exemple des vidéos, qu’il s’agisse de l’internaute lambda dont la vidéo ne dépassera sans doute pas quelques vues, ou de la célébrité qui cumulera des millions de vues.

Les débats ne font que commencer, ce texte devant désormais être discuté par le Parlement européen et le Conseil, l’ASIC souhaite que de ces discussions qui s’engagent résulte une clarification et une préservation du statut de l’hébergeur pour permettre à l’innovation et à la créativité d’être préservées sur Internet. Les positions de la France exprimées au lendemain de cette même publication confirment les craintes de l’ASIC.

Les dirigeants de l’ASIC déclarent : “Dans le cadre de la construction du Marché Unique du Numérique, la Commission semble, à ce stade, avoir oublié ses ambitions initiales de privilégier l’innovation et les start-ups pour finalement faire droit aux demandes des acteurs en place, créer des mécanismes de subvention, voire mettre en péril internet tel que nous le connaissons aujourd’hui”.

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